Night Must Fall

Night Must Fall est l’adaptation d’une pièce d’Emlyn Williams et le remake d’un film américain réalisé par Richard Thorpe (1937). Dans la lignée des psychopathes de Psychose (Alfred Hitchcock) et du Voyeur (Michael Powell, 1960), le film narre l’irruption de Danny (Albert Finney), un jeune homme dangereux mais serviable et séduisant, dans une maisonnée régie par Mme Bramson (Mona Washbourne), une vieille femme invalide. Celle- ci est entourée de sa fille Olivia (Susan Hampshire) et de Dora (Sheila Hancock), sa dame de compagnie. Danny va venir singer une ascension sociale idéale ; déjouer les attentes de ses supérieures en surpassant son statut d’homme à tout faire et tenter de se rendre indispensable jusqu’à s’immiscer dans la vie sexuelle et familiale de la demeure…

Dans Night Must Fall, pas de suspense pour annoncer la figure du tueur, identifiable dès les premières secondes du film ; on doit assumer d’être à ses côtés jusqu’à la fin…

Écartelé entre 3 femmes dont l’une est véritablement sa victime (et du même rang social que lui), Danny est une sorte de gigolo parvenu qui, pour survivre, se prostitue littéralement. Danny est une caricature sociale, l’image déformante et stéréotypée de la vision qu’a la classe moyenne anglaise sur la classe provinciale ou ouvrière subalterne. Il est le miroir déformé que la classe sociale supérieure lui appose.

Karel Reisz déconcerta… Au lieu de respecter la révérence « auteuriste » (et snob) que la critique associait au « Free Cinema », la nouvelle vague anglaise (Lindsay Anderson, Tony Richardson, John Schlesinger…), il s’en détourna lui préférant le thriller hitchcockien libéré de toute retenue sexuelle ! La grandiloquence satirique du film est même présente dans la musique ou dans le cabotinage d’Albert Finney. Son visage, un masque inexpressif ou crispé dans ses mimiques exacerbées, annonce étrangement le jeu grimaçant de Jack Nicholson dans Shining…