Fort Bronx

The Night of the juggler (1980) de Robert Butler est un bon polar avec ses scènes de poursuite (voiture et à pied) sur fond du kidnapping de la fille d’un ex-policier. Toutefois, il permet un dispositif génial et conceptuel plutôt original : un survival urbain où tous les corps de métier, où toutes les minorités, où toutes les classes d’âge et sociales sont sur le point d’exploser à force de frottement !

« Cette ville en crise perpétuelle a quelque chose de carnavalesque. » (Pauline Kael, Chroniques américaines, «Gothique urbain» in Deeper into Movies, octobre 1971)

The Night of the juggler est un film jouissif et peuplé de figures secondaires intermittentes qui décline la ville de New York, en plus de la trajectoire du parcours d’une chasse à l’homme toute particulière… : le kidnappeur s’est trompé de colis et la police pourchasse le père plutôt que le ravisseur… Bilan des courses : un effet burlesque tragi-comique redoutable… et surtout pour le protagoniste qui accumule sur lui, comme le Joko de Topor, toute une densité de personnes le pourchassant. Des flics aux membres d’un gang croisant sa route ! On passe ainsi d’une cacophonie (aussi bien visuelle que sonore) à l’autre et très habilement, grâce à l’alibi narratif d’un père cherchant désespérément sa fille… Une quête si désespérée que l’homme, le père, s’affranchit de toutes ses peurs morales, sociales, intimes tandis que le film se libère de toutes ses invraisemblances, bien utiles pour nous mettre en transe. L’enjeu policier du kidnapping permet, par ailleurs, de beaux morceaux de bravoure attestant de l’empathie du spectateur à tout ce qui se rattache à la question de « la filiation menacée » au cinéma : L’homme qui en savait trop, Nick of Time, Taken, Father, Logan,…