25/09/2019 @ 19:30
Damiano Damiani
1966 135mn, Italie VOST Fr
El Chuncho (Quien sabé ?) est un western rév0lutionnare italien réalisé par Damiano Damiani en 1966 (et tourné en Espagne) qui narre les tribulations d’un bandit mexicain (Gian Maria Volonté est El Chuncho) manipulé par un mercenaire américain (Lou castel est El Nino).
« Né en 1922, Damiani s’oriente d’abord vers la peinture, puis devient dessinateur de bandes dessinées avant de se tourner vers le cinéma en 1946. Décorateur et assistant réalisateur, Damiani apprend le métier et réalise dès 1947 un premier documentaire (La Banda d’Affori). À partir de 1953, il participe à l’écriture de nombreux scripts, comme Les Mystères de Paris de Fernando Cerchio, et devient l’un des collaborateurs réguliers de Viktor Tourjansky pour des fresques historiques telles que Le Roi cruel, Les bateliers de la Volga, et Les Cosaques. Damiani passe à la mise en scène de longs-métrages en 1960 avec Il Sicario, tout en restant son propre scénariste. Après plusieurs films intimistes (Jeux Précoces, La Femme des autres, L’Ennui et sa diversion), le cinéaste s’engage dans le film politique avec El Chuncho, western violent qui dénonce l’emprise des États-Unis sur l’Amérique latine. » (Eddy Moine, Notes de production en bonus du DVD du film Confession d’un commissaire de police au procureur de la République)
Gian Maria Volonté parachève le bandit mexicain truculent (le senor Tuco) du Bon, la Brute et du Truand de Sergio Leone sorti la même année avec Eli Wallach avant que Tomas Milian l’immortalise avec Cuchillo (Colorado en 1966 et Saludos Hombre de Sergio Solima en 1968), Tepepa (Tepepa de Giulio Petroni en 1968) ou El Vasco (Companeros de Sergio Corbucci en 1970). Le film bénéficie de magnifiques contrepoints liés à l’histoire du cinéma italien via l’hybridation des genres. Dans El Chuncho, Damiani projette des problématiques de cinéma politique engagé dignes d’un Francesco Rosi (Main basse sur la ville) ou d’un Gillo Pontecorvo (la Bataille d’Alger) avant de se consacrer dans les années 70 à la mafia (La Mafia fait la loi, Un juge en danger…). Dans ces derniers, Damiani se sert habilement de la fusion des genres avec la confrontation du cinéma citoyen et du « giallo » (Perché si ucchi de un magistrato), d’une part, ou du film policier à l’italienne (Confessions d’un commissaire de police au procureur de la République) d’autre part.
« El Chuncho est une subtile métaphore réquisitoire contre la politique d’ingérence des États-Unis dans les affaires de leurs voisins d’Amérique Latine, pays où les services secrets américains (CIA) ont organisé des manipulations politiques et économiques (en 1973, les services secrets américains ont financé la grève des camionneurs chiliens afin de déstabiliser le gouvernement socialiste de Salvador Allende et favoriser le putsch militaire du général Pinochet). El Nino, tueur à gages au service des puissances capitalistes, incarne parfaitement cette politique impérialiste camouflée qui manipulent les pays du tiers monde. » (Jean-François Giré, Il était une fois… le western européen)
C’est Franco Solinas, scénariste émérite de La Bataille d’Alger (1966) et de Queimada (1969), qui va adapter pour le cinéma l’idée originale écrite par Salvatore Laurani.
Lou Castel est donc à l’origine du personnage blanc de colon manipulateur interprété par Marlon Brando dans Queimada et, avant lui, dynamita le cliché du sympathique et empathique gringo qu’incarna Clint Eastwood dans les films de Sergio Leone entre 1964 et 1966 (dans la tradition du western américain). Lou Castel, d’orgine suédoise, a été révélé avec Les Poings dans les poches de Marco Bellocchio (1965) ; sa présence et l’austérité de son jeu renforcent la « maltraitance » d’une icône tant chérie par le grand public et les cinéphiles du monde entier au regard d’une période contemporaine et sociale des plus violentes (Vietnam, Algérie…).
« Né en 1922, Damiani s’oriente d’abord vers la peinture, puis devient dessinateur de bandes dessinées avant de se tourner vers le cinéma en 1946. Décorateur et assistant réalisateur, Damiani apprend le métier et réalise dès 1947 un premier documentaire (La Banda d’Affori). À partir de 1953, il participe à l’écriture de nombreux scripts, comme Les Mystères de Paris de Fernando Cerchio, et devient l’un des collaborateurs réguliers de Viktor Tourjansky pour des fresques historiques telles que Le Roi cruel, Les bateliers de la Volga, et Les Cosaques. Damiani passe à la mise en scène de longs-métrages en 1960 avec Il Sicario, tout en restant son propre scénariste. Après plusieurs films intimistes (Jeux Précoces, La Femme des autres, L’Ennui et sa diversion), le cinéaste s’engage dans le film politique avec El Chuncho, western violent qui dénonce l’emprise des États-Unis sur l’Amérique latine. » (Eddy Moine, Notes de production en bonus du DVD du film Confession d’un commissaire de police au procureur de la République)
Gian Maria Volonté parachève le bandit mexicain truculent (le senor Tuco) du Bon, la Brute et du Truand de Sergio Leone sorti la même année avec Eli Wallach avant que Tomas Milian l’immortalise avec Cuchillo (Colorado en 1966 et Saludos Hombre de Sergio Solima en 1968), Tepepa (Tepepa de Giulio Petroni en 1968) ou El Vasco (Companeros de Sergio Corbucci en 1970). Le film bénéficie de magnifiques contrepoints liés à l’histoire du cinéma italien via l’hybridation des genres. Dans El Chuncho, Damiani projette des problématiques de cinéma politique engagé dignes d’un Francesco Rosi (Main basse sur la ville) ou d’un Gillo Pontecorvo (la Bataille d’Alger) avant de se consacrer dans les années 70 à la mafia (La Mafia fait la loi, Un juge en danger…). Dans ces derniers, Damiani se sert habilement de la fusion des genres avec la confrontation du cinéma citoyen et du « giallo » (Perché si ucchi de un magistrato), d’une part, ou du film policier à l’italienne (Confessions d’un commissaire de police au procureur de la République) d’autre part.
« El Chuncho est une subtile métaphore réquisitoire contre la politique d’ingérence des États-Unis dans les affaires de leurs voisins d’Amérique Latine, pays où les services secrets américains (CIA) ont organisé des manipulations politiques et économiques (en 1973, les services secrets américains ont financé la grève des camionneurs chiliens afin de déstabiliser le gouvernement socialiste de Salvador Allende et favoriser le putsch militaire du général Pinochet). El Nino, tueur à gages au service des puissances capitalistes, incarne parfaitement cette politique impérialiste camouflée qui manipulent les pays du tiers monde. » (Jean-François Giré, Il était une fois… le western européen)
C’est Franco Solinas, scénariste émérite de La Bataille d’Alger (1966) et de Queimada (1969), qui va adapter pour le cinéma l’idée originale écrite par Salvatore Laurani.
Lou Castel est donc à l’origine du personnage blanc de colon manipulateur interprété par Marlon Brando dans Queimada et, avant lui, dynamita le cliché du sympathique et empathique gringo qu’incarna Clint Eastwood dans les films de Sergio Leone entre 1964 et 1966 (dans la tradition du western américain). Lou Castel, d’orgine suédoise, a été révélé avec Les Poings dans les poches de Marco Bellocchio (1965) ; sa présence et l’austérité de son jeu renforcent la « maltraitance » d’une icône tant chérie par le grand public et les cinéphiles du monde entier au regard d’une période contemporaine et sociale des plus violentes (Vietnam, Algérie…).
Il est aussi petit que Gary Cooper était grand, aussi fourbe que John Wayne droit, et asexué pour l’éloigner de toute humanité, ce qui renforce et détache la figure héroïque du bandit mexicain « fanfaron » naïf qui va prendre conscience de la nécessité d’une révolution et de son rôle dans celle-ci. La combinaison de ces deux personnages contradictoires, et leur relation, permet la prise de conscience politique et citoyenne de l’un d’eux (à voir Le dernier face à face de Sergio Sollima en 1967, classique du genre). Mais il ne faut pas tomber dans la critique d’un genre pour en saluer un autre. Le « western-Zapata », comme le western « spaghetti » son précurseur, est né aux États-Unis. En effet, on voit les prémices du genre italien dans la prise de conscience de certains films américains (de Bandido de Richard Fleischer en 1956 aux Professionnels de Richard Brooks en 1966) ainsi que de la figure masochiste et christique du héros (on se souviendra de James Stewart fouetté par Lee Marvin dans L’homme qui tua Liberty Valance de John Ford en 1962, mais surtout dans les films d’Anthony Mann). Le cinéaste Sergio Corbucci s’en souviendra avec Franco Nero (Django, 1966) ou Jean-Louis Trintignant (Le grand silence, 1968). Le cinéaste Lucio Fulci aussi (Le Temps du massacre, 1966). Enfin, il ne faut pas oublier Vera Cruz (1954) de Robert Aldrich et ses deux Protagonistes contradictoires et complémentaires (Gary Cooper et Burt Lancaster) perdus dans une révolution et assistant, non sans brio, à la fin d’un genre que réactivera le western à l’italienne.
« Est-ce un réalisateur ou un auteur ? C’est difficile de le situer, c’est pour ça qu’il mérite une relecture. Il est estimé et n’a pas besoin d’être réévalué, mais il faut le remettre en perspective dans l’histoire du cinéma italien. Par exemple, par rapport à Rosi et Lizzani, Damiani n’est pas assez bien considéré parce que sa singularité n’est pas suffisamment reconnue. C’est l’hommage qu’on peut rendre à la filmographie tant éclectique que discontinue qui fait son originalité et sa modernité. Damiani, parce qu’il croise le cinéma d’auteur et le film de genre, le cinéma élitiste et populaire, policier ou western, le cinéma citoyen et l’introspection psychologique, produit un puzzle très intéressant, une filmographie à redéoouvrir. » (Vito Zagarrio dans Damiano Damiani, un cinéaste engagé)
Enfin, comment ne pas mentionner Klaus Kinski, présence géniale et interdépendante du cinéma de genre par lequel il s’est fait connaître avant de jouer pour Werner Herzog ou Jesus Franco. Il faut noter trois films majeurs dans lesquels il s’est distingué via le western italien : Pour quelques dollars de plus (1965) de Sergio Leone, Et le vent apporta la violence (1969) de Antonio Margheriti et Le Grand silence (1968) de Sergio Corbucci.
Giuio Basletti
Il faut d’ailleurs réévaluer d’urgence un film comme Amityville 2 (1982), réussite majeure dans le film de genre horrifique que personne ne semble vouloir reconnaître, surpassant le premier opus (réalisé par Stuart Rosenberg en 1979), et où il confère au thème fantastique de la maison hantée une dimension sociale des plus crues en adaptant un faits-divers des plus bizarres et tragiques. « Plus proche de Family Life que de Poltergeist, par sa description critique et sociale du drame familial, bien au-delà de l’exploitation paranormale des lieux : un père violent, une mère bigote, des enfants corrigés. Objet clairement visé : l’enclos théâtral d’une famille conservatrice chrétienne et toute sa violence physique, morale et sexuelle » (Derek Woolfenden, tract bis du vendredi 4 juin 2004 ou 2005).
« Est-ce un réalisateur ou un auteur ? C’est difficile de le situer, c’est pour ça qu’il mérite une relecture. Il est estimé et n’a pas besoin d’être réévalué, mais il faut le remettre en perspective dans l’histoire du cinéma italien. Par exemple, par rapport à Rosi et Lizzani, Damiani n’est pas assez bien considéré parce que sa singularité n’est pas suffisamment reconnue. C’est l’hommage qu’on peut rendre à la filmographie tant éclectique que discontinue qui fait son originalité et sa modernité. Damiani, parce qu’il croise le cinéma d’auteur et le film de genre, le cinéma élitiste et populaire, policier ou western, le cinéma citoyen et l’introspection psychologique, produit un puzzle très intéressant, une filmographie à redéoouvrir. » (Vito Zagarrio dans Damiano Damiani, un cinéaste engagé)
Enfin, comment ne pas mentionner Klaus Kinski, présence géniale et interdépendante du cinéma de genre par lequel il s’est fait connaître avant de jouer pour Werner Herzog ou Jesus Franco. Il faut noter trois films majeurs dans lesquels il s’est distingué via le western italien : Pour quelques dollars de plus (1965) de Sergio Leone, Et le vent apporta la violence (1969) de Antonio Margheriti et Le Grand silence (1968) de Sergio Corbucci.
Giuio Basletti
Il faut d’ailleurs réévaluer d’urgence un film comme Amityville 2 (1982), réussite majeure dans le film de genre horrifique que personne ne semble vouloir reconnaître, surpassant le premier opus (réalisé par Stuart Rosenberg en 1979), et où il confère au thème fantastique de la maison hantée une dimension sociale des plus crues en adaptant un faits-divers des plus bizarres et tragiques. « Plus proche de Family Life que de Poltergeist, par sa description critique et sociale du drame familial, bien au-delà de l’exploitation paranormale des lieux : un père violent, une mère bigote, des enfants corrigés. Objet clairement visé : l’enclos théâtral d’une famille conservatrice chrétienne et toute sa violence physique, morale et sexuelle » (Derek Woolfenden, tract bis du vendredi 4 juin 2004 ou 2005).
Informations pratiques :
🕘 Ouverture des portes de La clef revival 🔑 à 19h30
Lancement de la séance à 20h00
34, rue Daubenton – Paris 5e
💰 Prix libre