Pour se donner de la force, durant les longs mois de recherche de financements, on se projetait joyeusement dans l’avenir : à quoi ressemblerait La Clef, quand on aurait réussi à acheter les murs et passé un bon coup de peinture ?
On a imaginé un projet dans la continuité de ce qu’a été La Clef durant l’occupation, et dans la perspective d’un fonctionnement pérenne, dans la légalité.
Pour commencer, la programmation sera toujours collective, ouverte et assurée par des bénévoles et des associations : toustes celleux qui le souhaitent pourront rejoindre le collectif usager, apprendre à organiser une projection et proposer un film. Notre souhait, c’est d’accueillir toutes les envies de cinéma, pour que le lieu soit aussi vivant que possible, toute la journée ! Et de cette façon, La Clef conservera une programmation éclectique, aussi variée que le sera son public. Il n’y aura qu’un principe à suivre : montrer des films qui ne sont pas ou plus diffusés ailleurs, puiser dans les catalogues et dénicher des œuvres hors circuit pour susciter des (re)découvertes !
La billetterie restera à prix libre, bien sûr ! La seule différence, c’est qu’elle sera désormais agréée par le CNC : sur chaque entrée, une part sera donc reversée au distributeur du film (nous les remercions à nouveau ici de nous avoir tant soutenu·e·s, durant l’occupation, en nous accordant des droits de projection à titre gracieux), et une autre sera collectée par le CNC pour contribuer au financement du cinéma indépendant.
Le café/bar associatif sera ouvert dès que possible pour favoriser l’échange entre les projections, les rencontres créatives, et offrir un espace de convivialité aux habitant.e.s du quartier ! La salle polyvalente, modulable, pourra à nouveau accueillir les initiatives des associations locales : réunions publiques d’information, assemblées, ateliers participatifs, formations…
Dans la partie du bâtiment qui ne peut pas accueillir du public, nous installerons trois salles de post-production (montage image et montage son). Deux d’entre elles pourront être louées à de jeunes cinéastes et à des sociétés de production émergentes : cela assurera l’indépendance et l’équilibre financiers de l’association, pour permettre à ses membres de programmer les films qu’iels aiment sans se soucier de leur rentabilité ! La troisième salle servira aux activités de l’association : réalisation de ciné-tracts, formations gratuites au montage, accompagnement des pratiques amateur, mise à disposition de collectifs partenaires, relance d’une résidence de création, etc.
Nous aménagerons aussi des bureaux pour deux permanent.e.s salarié·e·s : une personne responsable de la maintenance du bâtiment et des équipements techniques, et une autre chargée du suivi administratif et financier. Ce sont des missions lourdes et qui exigent une disponibilité continue : on ne pourra pas les faire reposer seulement sur des bénévoles. Les salarié·e·s veilleront notamment sur le budget de l’association : les recettes (cotisations annuelles des adhérents, billetterie des séances, produits du café/bar, locations des espaces de travail et subventions des collectivités) devront permettre de couvrir les dépenses (entretien du lieu, fluides et taxes foncières, loyer au fonds de dotation pour rembourser son emprunt, salaires et achats de fournitures). L’objectif n’est pas de dégager du profit, mais d’être à l’équilibre pour s’assurer que l’association perdure !
Ces deux salarié.e.s seront simplement des appuis pour l’association – ce sont bien les usager.e.s de La Clef qui décideront, en toute indépendance, des films que l’on y montre, des collectifs qu’on y accueille, des horaires d’ouverture, de la bière qu’on y sert et des nouvelles initiatives à mettre en œuvre. C’est tout le sens de notre projet, fondé sur la propriété d’usage et la notion de bien commun : permettre aux spectateur·ices d’imaginer et de construire ensemble un cinéma qui s’accorde à leurs désirs ! Pour ce faire, on conservera une gouvernance collégiale, où les décisions sont prises en commun, et une attention forte à la transmission des savoirs, en organisant pour les bénévoles des formations régulières à la programmation, à la projection, aux outils de communication…
Il faut donc bien admettre qu’on ne sait pas exactement à quoi ressemblera La Clef demain, puisqu’elle sera à l’image de toutes celles et ceux qui s’engageront pour faire vivre le lieu. De notre côté, on a déjà quelques idées – créer une université populaire du cinéma, une bibliothèque en libre accès… mais on a surtout hâte d’entendre les vôtres !